Forum Économique de l’Afrique de l’Ouest : Le Sahel a-t-il tourné le dos à l’intégration régionale ?

L’Afrique de l’Ouest a récemment connu un moment historique avec la tenue du tout premier Forum Économique de l’Afrique de l’Ouest (WAES 2025), initié et organisé à Abuja par le président nigérian Bola Ahmed Tinubu. Cet événement avait pour objectif de poser les bases d’une coopération économique renforcée entre les pays de la sous-région, sous le thème évocateur : « Une seule voix, un seul avenir ».

Durant deux jours, les chefs d’États, ministres, acteurs du secteur privé, investisseurs et partenaires au développement se sont réunis pour réfléchir à l’avenir économique de l’Afrique de l’Ouest. Un rendez-vous crucial dans un contexte où la nécessité de construire des économies locales fortes, résilientes et interconnectées n’a jamais été aussi pressante.

Mais au milieu de cette dynamique d’unité et de coopération, une absence a attiré l’attention de tous : celle des pays du Sahel.

Une absence stratégique ou idéologique ?

Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, trois pays liés aujourd’hui par une alliance politique et sécuritaire (l’Alliance des États du Sahel), n’ont envoyé aucune délégation officielle à ce forum économique régional. Aucun représentant politique, économique ou diplomatique. Rien. Le silence total.

Cette absence interroge. 

Elle soulève une série de questions profondes et dérangeantes : 

• Refuser de participer à une initiative panafricaine, portée par un pays frère, est-ce un message politique délibéré ? 
• Est-ce le reflet d’une volonté d’isolationnisme assumé ? 
• Ou est-ce tout simplement un choix stratégique dicté par une méfiance envers les autres États de la région, en particulier les membres de la CEDEAO ?

Le paradoxe des discours souverainistes

Ce qui rend cette décision encore plus étonnante, c’est que ces mêmes pays — Mali, Burkina Faso, Niger — prônent avec force un discours panafricain. Ils revendiquent leur souveraineté, leur indépendance, leur rupture avec les puissances occidentales. Ils dénoncent les ingérences, les logiques néocoloniales, et appellent à une Afrique des peuples, libérée et unie.

Mais comment peut-on revendiquer l’unité africaine, tout en boycottant un forum purement africain, porté par des Africains, pour les Africains ?

Comment peut-on refuser de s’asseoir à la table du dialogue économique régional, tout en recherchant des partenariats à des milliers de kilomètres, notamment en Russie, ou ailleurs ?

Ce double discours finit par fragiliser la crédibilité du projet panafricain qu’ils prétendent incarner.

L’économie n’a pas de frontières idéologiques

Quelles que soient les tensions politiques ou institutionnelles au sein de la CEDEAO, il est clair que l’économie doit rester un espace de coopération. Les routes, les marchés, l’énergie, l’agriculture, l’innovation, les start-up… aucun de ces secteurs ne peut prospérer dans l’isolement.

Aucun pays ne peut se développer seul, encore moins dans un espace aussi intégré que l’Afrique de l’Ouest. Le commerce régional, les accords bilatéraux, les investissements croisés sont des leviers incontournables pour créer de l’emploi, attirer des financements, et améliorer les conditions de vie des populations.

Le refus de collaborer économiquement avec ses voisins, au nom d’un isolement politique ou idéologique, n’est ni stratégique, ni visionnaire. C’est une forme de repli qui risque de coûter cher à moyen et long terme, surtout aux peuples qui, eux, ne demandent qu’à vivre dignement, commercer librement et construire leur avenir.

Le vrai panafricanisme passe par l’action

Le panafricanisme ne se résume pas à des slogans. Il se construit dans les faits, dans les alliances économiques concrètes, dans les projets communs, dans la circulation des idées, des biens et des personnes.

Le forum de Tinubu, qu’on l’apprécie ou non, a eu le mérite de rassembler une grande partie des pays de la sous-région autour d’une vision commune. Le boycotter, c’est se priver d’une voix, d’un espace, d’une opportunité d’influence, et surtout, c’est abandonner le terrain aux autres.

Conclusion : Quelle voie pour le Sahel ?

Aujourd’hui, il est légitime de se poser la question : Les dirigeants des États du Sahel veulent-ils vraiment faire avancer leur pays économiquement, ou leur priorité est-elle uniquement de consolider leur pouvoir ?

L’histoire jugera.

Mais ce qui est certain, c’est que l’Afrique ne se construira pas dans le repli, ni dans la rupture permanente. Elle se construira par le dialogue, la coopération, la solidarité, et la capacité de ses dirigeants à dépasser les clivages politiques pour penser aux générations futures.

Le développement est un projet collectif. Et si nous voulons voir naître une Afrique forte, libre et unie, nous devons être présents là où l’Afrique se construit.

Qu’en pensez-vous ? Le Sahel a-t-il commis une erreur stratégique en boycottant le WAES 2025 ? 

Le panafricanisme peut-il exister sans la coopération économique ?

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